Il y a de ces œuvres que l’on découvre totalement par hasard, grâce à un évènement quasiment insignifiant, mais qui laissent en nous une influence indélébile. Je vous ai déjà parlé à plusieurs reprises d’œuvres que j’aime énormément et que j’aurai pu ne jamais découvrir si un petit détail dans le cours des évènements avait été changé, comme par exemple Battle Royale ou Assassination Classroom. Parmi une myriade d’autres cas, il y en a un sur lequel j’aimerai me pencher dans cette chronique. Un film culte des années 70. Un film qui figure parmi mes films comiques préférés. Un film découvert à mon dernier cours de français de seconde en remplacement d’un cours sur le naturalisme. Un film dont presque chaque scène m’a marqué d’une façon ou d’une autre. Ce film, c’est le second film des Monty Python: Sacré Graal, ou Monty Python and the Holy Grail en VO.
Pour ceux qui ne connaîtraient pas les Monty Python, il s’agit d’une troupe d’humoristes britanniques composée de John Cleese, Eric Idle, Graham Chapman (décédé en 1989), Michael Palin, Terry Jones et Terry Gilliam (qui s’illustra aussi en réalisant des films tels que L’Armée des 12 singes). Leur popularité commença avec la diffusion de leur série télévisée Monty Python’s Flying Circus, basée sur des sketchs et des parodies d’émissions, à travers lesquels sont dénoncés de nombreux aspects de la très puritaine société britannique de l’époque. La série posait les bases d’une des marque de fabrique de la troupe: l’humour absurde (nous y reviendrons plus en détails). Celle-ci connaîtra d’ailleurs une adaptation sur le grand écran avec une anthologie des meilleurs sketchs des Python, regroupés en un long métrage nommé La Première Folie des Monty Python (And now for something completely different en VO). Après l’arrêt de la série en 1974, trois autres films suivront : Sacré Graal, La vie de Brian et enfin Le sens de la vie. Aujourd’hui, la troupe est séparée et chaque membre poursuit sa propre carrière. Mais cependant, leur influence sur le monde de l’humour, aussi bien à travers leur sketchs que leurs films, n’a pas diminué et continue d’inspirer aujourd’hui encore.
Attaquons maintenant le sujet qui nous intéresse : Sacré Graal, sorti en 1975 dans les salles obscures et réalisé par les deux Terry de la bande. Ce film nous narre l’histoire du noble roi Arthur et de ses valeureux chevaliers de la Table Ronde. Alors qu’ils font route vers Camelot, Dieu leur apparaît et les charge d’une mission capitale : inspirer l’humanité en trouvant le Saint Graal, dissimulé quelque part dans le monde. Nos héros acceptent et se lancent alors dans une aventure épique au cours de laquelle ils dépasseront leurs limites, exploreront des lieux emplis de mystères et affronteront d’innombrables dangers. Parmi ceux-ci se trouveront notamment un lapin tueur, des chevaliers qui disent «Ni!» et les jeunes et nombreuses occupantes du château d’Anthrax.
Si vous ne connaissez pas le film, vous devez avoir commencé à vous poser des questions quand le résumé s’est mis à parler de lapin tueur. Sacré Graal n’est clairement pas le genre de film qu’il faut essayer de prendre au sérieux, au risque de le détester. En effet, bien que le contexte du récit de chevalerie laisse espérer une aventure sérieuse et grandiose, absolument tout ici est prétexte à partir dans le n’importe quoi le plus décomplexé.
Il s’agit en plus d’un très bon départ pour s’initier à l’humour des Monty Python, là où d’autres de leurs films tels que Le sens de la vie restent bien moins accessibles aux néophytes. Pourquoi moins accessibles? Je m’explique. L’humour de la troupe a beau être absurde, cela ne signifie pas que leurs blagues empilent bêtement des éléments sans lien logique en espérant que ça soit drôle, comme par exemple une banane à moustaches jouant du banjo sur le dos d’un éléphant. Leurs blagues sont tournées de façon bien plus intellectuelle, basées sur des jeux de mots, quiproquos et détournements. Parfois elles font référence à des personnages ou évènements historiques qu’il faut connaître pour complètement saisir le gag, laissant alors sur le carreau les personnes n’ayant pas les connaissances requises (ce qui est souvent mon cas, je l’avoue). Ici, Sacré Graal reste dans cet esprit mais en évitant les références obscures et en versant plus volontiers dans le spectacle guignolesque, l’humour visuel et les conversations qui dévient complètement de leur but initial. Mais nous allons y revenir point par point.
Une des premières choses qui frappe lors du premier visionnage de Sacré Graal, c’est son budget assez serré, à savoir 230 000 livres sterling, soit environ 266 000 euros. Bien que cela semble représenter une somme conséquente, il s’agit en fait d’un budget très faible dans le milieu du cinéma. À titre de comparaison, le film Barry Lyndon de Stanley Kubrick sorti la même année disposait d’un budget de onze millions de dollars, soit un peu plus de huit millions de livres sterling, tandis que les gros blockbusters actuels se voient octroyer des budgets dépassant sans soucis la centaine de millions. Pour en revenir au film qui nous intéresse, le budget restreint se ressent à l’écran et les Monty Python rivalisent d’astuce pour tenter de mener à bien toutes leurs idées. Mais là où le film fait vraiment fort, c’est dans sa capacité à transformer ce manque d’argent en gags.
Attention, cela ne fait pas pour autant de Sacré Graal un nanar. En effet, ces derniers sont des films dont la nullité est telle qu’ils en deviennent involontairement drôle. Nullité bien souvent (mais pas toujours) dû à un très faible budget empêchant d’avoir des scénarios, dialogues, acteurs et effets spéciaux de bonne qualité. Les nanars se prennent pourtant au sérieux et mettent en scène leur idée de base avec la volonté d’en tirer quelque chose de bon. C’est ce mélange improbable de nullité involontaire et de premier degré malgré l’échec qui rend les nanars drôles. Sacré Graal, au contraire, est parfaitement conscient des limites imposées par le budget et décide donc d’en jouer. Le manque d’argent n’est alors pas subi, mais exploité avec humour pour donner naissance à des gags. L’exemple le plus connu est celui de la noix de coco et des chevaux. Les Python n’ayant pas eu assez d’argent pour louer des chevaux (ce qui est plus ou moins essentiel pour des chevaliers), tous les passages de déplacement en équidé mettent en scène un personnage mimant une chevauchée, suivi par un serviteur frappant entre elles deux moitiés de noix de coco pour simuler le bruit des sabots. Je ne plaisante pas.
Bien entendu, le budget est très loin d’être le seul ressort comique du film. La troupe des Monty Python déploie ici tout un éventail de façons de faire rire, notamment des gimmicks typique de leur humour absurde britannique. L’un de ceux que je préfère sont les conversations qui, à cause d’un détail, dévient complètement de leur sujet initial. Par exemple, une scène où Arthur interpelle ce qu’il croit être une vieille femme se termine en débat sur sa légitimité en tant que roi avec le représentant d’une «communauté anarcho-syndicaliste». Encore une fois, je ne plaisante pas. Ce genre de déviation arrive à plusieurs reprises dans Sacré Graal, débouchant à chaque fois sur discussions qui en deviennent comiques tant les personnages s’enlisent dans un débat de plus en plus éloigné du sujet de base. Il arrive d’ailleurs que des détails anodins de ceux-ci réapparaissent plus tard dans le récit. Si vous avez vu le film, un exemple vous viendra peut-être à l’esprit (indice : hirondelle).
Ce qui me plaît le plus dans l’humour de Sacré Graal (et plus généralement celui des Monty Python), c’est son imprévisibilité de tous les instants. Même lorsqu’on s’attend à voir un gag nous tomber sous le nez, celui-ci réussit à nous surprendre de par son exécution. La façon de susciter le rire chez le spectateur (avec succès ou non, tout dépendant de votre rapport à ce style d’humour) se renouvelle sans cesse. Une scène vous montre un personnage réagir avec flegme à la perte d’un bras, la qualifiant de «blessure superficielle», une autre joue avec le montage lorsque Lancelot court pour donner l’impression qu’il fait du sur-place, tandis qu’une troisième brise le quatrième mur d’une façon aussi brusque qu’hilarante. Et que dire de ce français colérique aux insultes mémorables? Quel doux souvenir que les phrases «Ta mère était un hamster et ton père sentait les baies de sureau!» et «Je pète dans votre direction!».
Depuis le début de cette chronique, je vous décris des scènes plutôt insolites, autant par leur écriture que par ce qu’elles mettent en scène. Une question vous est alors peut-être venue à l’esprit : comment réussir à lier tout cela de manière cohérente? En effet, Sacré Graal est ce que l’on appelle un film à sketchs. Il est composé de petits segments d’histoires indépendants les uns des autres, chacun étant un court sketch à part entière. Ces fragments sont ici reliés par le fil rouge qu’est la quête du Graal et les transitions entre deux se font notamment via des séquences animées par Terry Gilliam. Ainsi, chacun des chevaliers mènera d’ailleurs sa propre aventure de son côté avant que le groupe ne se réunisse pour l’aventure finale. La narration a beau être décousue, elle ce n’est pas pour autant qu’elle est difficile à suivre. Malgré son contexte historique très ancré dans l’imaginaire collectif, l’univers de Sacré Graal est si absurde et déjanté dès les premiers instants que l’on comprend immédiatement qu’il ne faut pas s’attendre à une histoire sérieuse. Ainsi, le spectateur est mis en condition pour qu’on lui raconte une histoire tranchant avec les codes usuels de la narration, et ne cherche pas forcément à chercher partout de la cohérence et des liens logiques. Je pense que pour pouvoir apprécier Sacré Graal, il faut accepter l’idée qu’il ne se prend pas une seule seconde au sérieux et qu’il faut parfois ne pas y chercher de sens. En fait, cela peut aisément se comprendre dès le générique d’ouverture (les personnes ayant vu le film comprendront de quoi je parle).
En règle générale, je profite de mes chroniques pour m’attarder sur un personnage qui se détache des autres dans l’œuvre dont je parle. Mais ici, le nombre de personnages, la nature de film à sketchs de Sacré Graal et sa durée d’une petite heure et demie font qu’aucun ne m’a vraiment plus marqué que les autres. Chacun des chevaliers a droit à son heure de gloire, mais je trouve qu’il n’y en a pas un qui sorte particulièrement du lot. Je vais donc cette fois-ci m’attarder sur une scène du film que j’apprécie beaucoup et qui selon moi condense une bonne partie de ce que j’apprécie dans ce film : la caverne du lapin tueur. Bien que celle-ci se trouve vers la fin du film, il n’y a selon moi pas matière à spoiler. Si toutefois vous préférez garder le plaisir de la découverte, je vous invite à sauter le paragraphe qui suit.
ZONE PAS VRAIMENT SPOILER
Peu de temps après qu’Arthur et ses chevaliers se soient réunis par hasard en cherchant individuellement le Graal, ils sont guidés par un enchanteur du nom de Tim à une caverne qui contiendrait un précieux indice pour leur quête. Seul bémol, ladite caverne est gardée par une bête féroce et les ossements de cinquante hommes jonchent le sol devant son entrée. Les chevaliers sont alors bien surpris de se retrouver confronté à un petit lapin blanc. Ne prenant pas au sérieux les avertissements de Tim, ils apprennent à leur dépens que cette petite boule de poil est bel et bien un monstre sanguinaire.
L’absurdité de la scène, une dizaine de chevaliers en armure malmenés par un lapin, suffit déjà à arracher un sourire, et la mise en scène ne fait que l’accentuer. La mort du premier chevalier est accompagné d’une musique exagérément dramatique et les effets spéciaux sont, encore une fois grâce au manque de budget, transformés en gag : du faux sang clairement visible, l’utilisation d’une peluche de lapin et une décapitation…comment dire? Bon après tout, une image vaut mille mots.
Nos braves chevaliers réussissent tout de même à vaincre le terrible lapin en utilisant une relique sacrée : la Sainte Grenade d’Antioche, qui sort tout droit de...ben elle était là, ne cherchez pas d’explication. Après la lecture laborieuse d’un mode d’emploi aux allure de texte religieux, Arthur dégoupille la grenade, la lance et c’en est fini du lapin tueur. En temps normal, j’aurais souligné le fait qu’il s’agit d’un deus ex machina, c’est-à-dire un élément sorti de nulle part pour résoudre un problème de manière brusque, chose à éviter absolument dans l’écriture d’un scénario. Mais ici il est poussé à un point tel qu’il est évident que c’est une énième façon pour les Monty Python de mettre un gag en place.
Enfin, nos chevaliers entrent dans la caverne et y découvrent gravé à même la pierre les derniers mots de Joseph d’Arimathie, expliquant que le Graal se trouve au «château d’Aaaaarrrrrrggghhh». C’est alors l’occasion d’assister à une nouvelle discussion laborieuse autour d’un détail, à savoir ici pourquoi ce qui semble être le râle d’agonie de Joseph est gravé sur le mur. Mais c’est alors que surgit le gardien des lieux, la légendaire Bête Noire d’Aaaaarrrrrrggghhh, obligeant nos valeureux protagonistes à prendre courageusement la fuite. La poursuite est évidemment réalisée en animation minimaliste pour des raisons de budget, accompagnée de bruitages du plus bel effet qui font que l’on se croirait presque dans un cartoon. Comment vont-ils s’en sortir? C’est très simple : en combinant deus ex machina et violente destruction du quatrième mur (et si vous avez lu certaines de mes chroniques, vous savez peut-être que j’aime quand des œuvres cassent le quatrième mur de façon créative). L’animateur est foudroyé par une crise cardiaque et le péril graphique disparaît. Dis comme ça, cela peut sembler gratuit est pas vraiment drôle, mais je vous assure que dans le contexte, autant grâce à la soudaineté et l’imprévisibilité de cet infarctus qu’au jeu d’acteur tout en finesse, ce passage peut être hilarant. Pour la deuxième fois, une image vaut mille mots...
En résumé, cette scène résume pour moi assez bien l’humour de Sacré Graal, car elle combine beaucoup des différents procédés comiques que ce dernier emploie : postulat de base déjanté, faible budget transformé en gag, conversation qui dévie de son sujet de base et s’éternise sur un détail, animations humoristiques, bruitages et musiques ridiculement dramatiques, cassage du quatrième mur (car cela arrive bien plus d’une fois dans le film) et enfin chute brutale et inattendue.
ZONE PAS VRAIMENT SPOILER
Quittons les terribles terres du spoil qui n’en est pas vraiment pour faire un petit aparté musical. Malgré son budget rachitique (oui encore lui), Sacré Graal a réussi a obtenir une bande originale plutôt sympathique, créée par Neil Innes et plusieurs autres compositeurs. Sans pour autant être incroyable, elle arrive à retranscrire une ambiance médiévale tantôt champêtre, tantôt épique. Le thème principal sort d’ailleurs du lot avec ses cuivres qui semblent annoncer une grande aventure pleines de péripéties, d’actes nobles, de monologues dramatiques, et vient donc trancher avec la réalité. Le contraste entre cette musique galvanisante et Arthur chevauchant un équidé imaginaire est plus que saisissant. Je vous conseille d’aller l’écouter à l’occasion, de même que la délirante chanson des chevaliers de Camelot, véritable comédie musicale d’une minute trente.
Un petit extrait de la chanson de Camelot, si vous hésitez encore. |
Rangez vos fourches, je préfère la VO! Néanmoins, je trouve que le doublage québecois est ici globalement réussi. Le casting vocal est à mon goût très bien trouvé, par exemple avec la voix un peu perchée d’Arthur qui tranche de façon comique avec la prestance de celle de son interprète Graham Chapman. On y trouve même quelques petites trouvailles bien sympathiques, comme le vendeur de bosquets transformé en «bosquetteur». Mais pendant que nous parlons traduction, certains passages des sous-titres m’ont fait tiquer, bien que je ne parle pas couramment anglais. Prenons l’exemple de la réplique «He hasn’t got shit all over him», explication du fait qu’Arthur ait l’air d’un roi. Celle-ci est traduite dans les sous-titres de la réédition des quarante par «Il n’est pas crotté comme un gueux». L’ennui, c’est que l’aspect comique vient ici en partie de la vulgarité moderne de la phrase, qui tranche avec le parler moyenâgeux auquel on pourrait s’attendre. Dans les sous-titres de Netflix (car oui, le film est disponible sur Netflix), la phrase est cette fois bien traduite par «Il n’est pas couvert de merde», de même que dans la version québecoise. Pour plus de détails, je vous recommande chaudement l’épisode de Parlons VF, émission YouTube de Misterfox sur le doublage, consacrée aux Monty Python.
Sans transition, aimez-vous les anecdotes de tournage? Moi oui. Ce sont parfois des moyens de comprendre la façon dont a été fait un film, le contexte de son tournage, et caetera. Certaines peuvent même changer votre façon de voir une scène. Je n’en ai pas de ce calibre sur Sacré Graal, mais il y en a une que j’aime bien quand même. Juste avant le début du tournage, alors qu’ils avaient repérés en Écosse et au Pays de Galles des châteaux où tourner, les Monty Python ont appris qu’ils en avaient été bannis par National Trust, une association dédiée à la conservation de monuments et sites historiques. La raison? Ils ne respectaient pas «la dignité de la nature du bâtiment, où des gens s’étaient fait torturer, éventrer et massacrer dans le passé» (Terry Gilliam, lors d’une conférence à New York en 2015 à l’occasion des quarante ans du film). Heureusement, la troupe a pu tourner certaines scènes au château de Doune, et pour les autres ils étaient obligés d’utiliser des dessins et des maquettes, en exploitant bien sûr ce problème pour en faire une blague. Mais en ce qui concerne la scène finale au château de Stalker, où ils avaient l’autorisation de tourner, ils n’avaient tout simplement pas les clés. Le fils du propriétaire du château a donc dû prendre l’avion pour venir leur donner, afin qu’ils puissent «entrer et couvrir Terry et Graham de merde» (Terry Gilliam, à la même conférence).
Le château de Doune, en Écosse. |
Le château de Stalker, dans le Loch Laich, en Écosse. |
Bon puisque vous êtes sages, voici une autre anecdote, mais concernant cette fois l’avant-première du film à New York. Un acteur avait été chargé de se promener en ville habillé en chevalier, mimant une chevauchée et suivi d’un serviteur frappant des noix de coco, tout en arborant un panneau qui disait «Venez voir Monty Python:Sacré Graal! Les mille premiers clients auront des noix de coco gratuites.». Non seulement beaucoup de personnes sont venues, mais en plus elles ont ensuite réclamés leurs noix de coco et les Monty Python ont même dû signer des autographes dessus.
Je pense avoir fait le tour de ce qui me plaît dans Sacré Graal, alors parlons maintenant un peu de son héritage. En effet, il s’agit d’un film qui a marqué son époque et inspiré de nombreux créateurs et créatrices par la suite. Par exemple, Alexandre Astier n’a jamais caché s’être inspiré de Sacré Graal lors de la création de sa célèbre série Kaamelot. On retrouve également des références à des scènes iconiques du long métrage dans de nombreuses autres œuvres. Voici quelques exemples venus du monde du jeu vidéo. Dans la série Worms, la Sainte Grenade est depuis les premiers jeux une arme connue pour sa puissance dévastatrice et son fameux «Hallelujah!» avant l’explosion. Parmi les centaines et les centaines d’objets que l’on peut créer dans Scribblenauts Unlimited, on trouve un chevalier noir perdant un membre à chaque coup subi. Enfin, le monde ouvert The Witcher 3 inclut une caverne dont l’entrée est jonchée d’ossements et devant laquelle se balade un petit lapin blanc immortel.
Cela vous rappelle-t-il quelque chose? |
D’ailleurs, comment se fait-il que le film ait tant marqué et continue d’inspirer aujourd’hui? À mon humble avis, c’est peut-être parce qu’il est arrivé au bon moment, dans une société anglaise dont la mentalité conservatrice était souvent malmenée et moquée par l’humour irrévérencieux des Monty Python. Lors d’une interview à New York pour fêter les quarante ans du film, on a d’ailleurs posé cette question aux Monty Python, et ils ont répondu que selon eux cela venait du fait qu’il mette en scène des personnages modernes dans un contexte historique, qu’il s’agit d’un film sale et médiéval dans son ambiance mais dans lequel évolue des personnages qui agissent de façon absurde et, d’une façon ou d’une autre, sont contemporains. Terry Gilliam résume d’ailleurs cette idée avec la phrase suivante: «La clé, pour nous, c’était d’ancrer ce contenu débile dans de la vraie boue, dans la réalité concrète.». Mais il peut aussi y avoir une foule de raisons différentes qui peuvent influencer la reconnaissance qu’obtient une œuvre. Après tout, combien d’entre nous se sont déjà retrouvés face à un film, une musique ou un livre méconnu dont ils estimaient que le succès était bien trop faible par rapport à sa qualité? Le meilleur moyen reste dans ce cas de les partager avec son entourage.
Pour aller plus loin :
* Si Sacré Graal devait vous plaire, pourquoi ne pas vous essayer aux autres films des Monty Python? Bien qu’ils soient plus délirants et un peu moins accessibles, ils valent le coup d’œil.
* Si vous voulez un avis détaillé et bien argumenté sur les versions françaises de l’oeuvre des onty Python, je vous recommande à nouveau l’épisode de Parlons VF qui leur est consacré.
* Je vous ai donné quelques anecdotes au sujet de Sacré Graal et de son tournage, mais il y en a beaucoup d’autres que je n’ai pas évoqué pour éviter que cette chronique ne ressemble à un catalogue indigeste. Mais si vous souhaitez en connaître d’autres, je peux vous conseiller un article de Première sur une fin abandonnée (pour des raisons de…? Budget! C’est bien vous êtes attentifs.) et des scènes retirées de la version finale, ainsi qu’un autre relatant les négociations entre la troupe et le comité de Censure britannique.
* En 2002, la société Spite Your Face Productions fut contactée par les Monty Python pour réaliser un court-métrage en Lego reprenant la chanson des chevaliers de Camelot. Vous pouvez en savoir plus sur cette société sur son site officiel.
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